Dans ce 3ème VERBATIM, en cohérence avec notre ambiance chaotique : retour sur le DÉBAT, outil d'un dialogue apaisé, billet d'humeur au nom des boomers responsables de tout, nouvelles de l'Afghanistan, pays fracturé, une page de pub et de contre pub, avant, comme toujours, de partir au Guatemala. Illustration d'ouverture : photo personnelle.
HABEMUS PALABRAM : LE RETOUR
HUMEUR DE BOUMEURE
CONTRE PUB ET PUB
NOUVELLES D’AFGHANISTAN, PAYS FRACTURÉ
ARCHÉO FEUILLETON : CHRONIQUES DU MONDE MAYA
BUON COMPLEANNO, VICENZO!
BONNE LECTURE !
En ce temps de violence de tous contre tous, revenons sur l’intérêt du débat. Dans le n°23 de cette lettre - Habemus palabram - , était posée la question : À quoi sert le débat ?
Pour tenter d’y répondre, j’avais retrouvé un texte commis il y a quelques années, ‘Réformes et dépendances’, paru en 2019 aux Presses des Mines dans un ouvrage collectif. Je posais un axiome : le débat vise à mettre en évidence des questions pérennes et à proposer, pour les traiter, des pistes d’actions réalistes et pertinentes. Ainsi peut-il contribuer à l’évolution des pratiques, sans (trop) de heurts, pas à pas, essai après essai. J’ajoutais que l’une des illustrations de la responsabilité citoyenne est la capacité de débat pour être pleinement acteur des évolutions de la société. Le problème c’est qu’un tel axiome ne l’est pas pour tout le monde. Il n’est pas un fait établi et valable par exemple aux yeux de ceux (petits et grands dirigeants) qui en font un outil de manipulation au service de l’adhésion populaire à la mise en place de projets contestés. Aujourd’hui, la France ressemble de plus en plus à une « société de la défiance », où chacun se méfie de ‘l’autre’ et particulièrement de ceux qui nous gouvernent tout en évoquant à chaque phrase la confiance que nous devons leur accorder. Or, comme chacun sait, la confiance ne se décrète pas. L’installer progressivement par l’écoute et le dialogue n’est pas naturel. L’échange est menacé par la polémique, généralement stérile, la volonté de parler plus fort, plus longtemps, plus souvent, pour occuper le terrain, l’agressivité du ton. Dans notre contexte inquiet, incertain, instable, frileux, nous avons plus que jamais besoin de construire des ponts, de nouer de nouveaux liens citoyens, nous avons plus que jamais besoin d’un débat sinon apaisé du moins respectueux de la parole des uns et des autres. L’ambiance mérite que l’on s’attarde sur la question. Et, justement, Dominique de Vincennes nous en propose sa perception. Lisons-le.
La question, à mes yeux, est-elle "trop ou trop peu" de débat public (ou assimilé, du genre "convention citoyenne") ? Pour ma part, je suis bien embarrassé pour répondre. Que ce soient le spectacle consternant des débats à l'Assemblée Nationale, la vacuité des échanges télévisuels, la pauvreté des bavardages sur Internet, simples juxtapositions de monologues, la stérilité des enquêtes des instituts de sondage sur "des échantillons - toujours- représentatifs de la population", je ne vois qu'un trop-plein improductif et peu enrichissant. D'un autre côté, à voir le retour régulier et fatigant ad nauseam des mêmes questions tout autant irrésolues : l'environnement malmené, la réforme nécessaire mais impossible des institutions, le mal-être croissant des populations inconscientes pourtant du bonheur de vivre en France, je serais tenté de dire qu'il n'y a pas assez débat, ne serait-ce que pour clarifier et préciser les bonnes questions à traiter !
Vous nous interrogez sur notre expérience du débat public. Professionnellement, j'en ai connu, suivi et pratiqué plusieurs au sens administratif du terme. Je n'en ai pas tiré beaucoup d'enseignements positifs. En effet, les attentes des deux côtés sont souvent asymétriques : le maître de l’ouvrage considère que c'est une étape formelle nécessaire qui lui permettra d'améliorer la compréhension par le public de l'utilité de l'ouvrage et lui donnera peut-être quelques idées sur l'amélioration (marginale) de son projet. Pour le public - ou, plus exactement, les opposants qui vont être la très grande majorité des intervenants - il s'agit d'obtenir l'abandon du projet ou - au mieux - un remaniement de grande ampleur. De telles attentes sont incompatibles et, bien souvent, aucune des deux parties n'obtient ce qu'elle espère : une adhésion ou, à l’inverse, une annulation ! D'où de grandes frustrations sans parler d'une violence qui exacerbe les tensions et laisse le paysage encore plus tourmenté après qu'avant… (…) Lire la suite : Cela peut aller jusqu’à l’impossibilité même de tenir les réunions. “C'est donc la négation par l'absurde du débat qui conclut à l'impossibilité de débattre ! Je crains que sur de nombreux sujets, la société française ne s'approche de ce paroxysme et que, pour les raisons que vous évoquez (défiance, absence d'écoute du discours de l'autre), nous ne nous approchions de ce seuil de non-débat. Il est possible (et probable) que le choix des sujets entre pour beaucoup dans la complexité de l'organisation d'une discussion ouverte et sereine. Mais c'est une autre question : de quels sujets peut-on débattre sereinement ?
Une dernière remarque (à ce stade). La frustration des participants à un débat tient pour beaucoup aux suites (ou plutôt, à l'absence de suites) des discussions. (…) Lire la suite : “Or, il faut, d'entrée de jeu, indiquer ce à quoi servira ou ne servira pas le débat, ou bien il faut s'engager très fortement à concrétiser les avancées convergentes et ne pas oublier de le faire !
Merci, Dominique de cet apport … Au débat ! Vous ajoutez qu’il s’agit “d’un sujet sur lequel il faudra sûrement revenir.” Et vous avez raison, il sera de nouveau exploré en cette rentrée 2025 dans le nouveau format de cette lettre qui sera toujours plus ouverte aux débats pour resserrer le lien citoyen… Ou corriger nos erreurs possibles.
À propos d’erreurs, merci à Jean-Pierre de Nice et à Pierre de La Varenne qui ont réagi à l’article ‘Vienne, mon vieil amour’, paru dans le numéro 20 - Verbatim d’hiver - par un rappel à la vérité historique. Je fais amende honorable, ils ont raison. S’agissant de « cet empire sur lequel le soleil ne se couchait jamais », c’était bien de l’empire autrichien dont il était question, et non de l’empire britannique. Pierre précise :
À l’époque de son apogée, sous Charles Quint (16ème siècle), l’empire de la dynastie des Habsbourg allait des confins de l’Europe jusqu’au continent sud-américain et aux Antilles. Le soleil ne s’y couchait donc jamais ! Et Vienne était le centre de cet empire, aussi immense qu’éphémère (à la mort de Charles Quint, il fut divisé entre son frère et son fils).
Une question clé pour nous les vieux : à quoi devrions-nous servir ? Il paraît qu’il nous revient de contribuer largement au remboursement de la colossale dette de notre douce France, cher pays de notre enfance, vu qu’on en est les responsables. Pire : on est coupables. De tout. Eh bien ! Laissez-moi me rebiffer. Ce siècle (dernier) avait 47 ans quand je suis venue au monde. Je suis donc, je ne peux le nier, une typique Boumeure soixante huitarde. Mais je proteste vivement, je n’ai jamais rien emprunté à l’Etat, c’est plutôt lui qui m’a emprunté mes économies, ma force de travail et ma capacité reproductive. Sur ce dernier point, je dois avouer que ce n’est pas brillant : je n’ai donné naissance qu’à un seul descendant. Pas de quoi renflouer les caisses bientôt vides de ce même Etat. Circonstance atténuante : cet unique descendant est pour ce même Etat une ressource exceptionnelle depuis de très longues années (plaidoyer pro domo). Quant à moi, j’ai travaillé durant toutes mes études, pour les financer, et j’ai continué à travailler jusqu’à un âge avancé à la sueur de mon cerveau, et beaucoup plus que 35 heures par semaine. Je me suis tout au long de ma longue vie engagée dans des activités ‘citoyennes‘ aussi prenantes que bénévoles, et je continue à l’âge du déambulateur. J’ai voté à chaque élection où ma voix était sollicitée. Je n’ai jamais critiqué les jeunes générations au café du commerce, car je ne vais pas au café du commerce. Si j’ai manifesté, c’est seulement avec 3 millions d’autres personnes juste après l’attentat contre Charlie Hebdo. Je donne généreusement et chaque année à des fondations et associations d’intérêt général, et pas seulement pour réduire mes impôts, que je trouve tendance confiscatoires, mais que je paie quand même, étant légaliste. À l’aube de ma retraite, j’ai donné quelques années de ma vie à une activité d’aidante sans me lamenter bien que je n’ai pas la vocation, parce que, n’est-ce pas, c’est par amour. J’ai fait quelques cadeaux par ci par là à ceux que j’aime. Et, oui, je me suis également fait plaisir, considérant qu’après tout, je l’avais bien mérité. En somme, j’ai, au soir de ma vie de boumeure, la conscience tranquille. C’est d’ailleurs, si j’ai bien compris, ce qu’on me reproche amèrement. Je le clame donc haut et fort : arrêtez, chers puissants qui nous gouvernent, d’essayer par tous les moyens de nous culpabiliser, de nous piquer le pognon (pas vraiment de dingue) que nous avons gagné et que nous distribuons déjà largement autour de nous (Boumeur qui roule n’amassa pas grand-chose). Arrêtez de nous reprocher de ne pas être encore morts (un bon boumeur est un boumeur mort), encore un jour Docteur, s’il vous plaît. Rappelez-vous à quoi nous servons. Qui, mieux que nous, incarne la mémoire collective et l’expérience propres à enrichir la réflexion publique et apporter une perspective historique sur les enjeux de société ? Qui plus que nous, faisons vivre toutes les formes de bénévolat, moteur important de la cohésion sociale et de la vitalité démocratique locale ? Rappelez-vous que nous sommes disponibles (ça dépend des moments), compétents (pas tous), en pleine santé (enfin, bon) pour nous engager encore davantage. Nous ne sommes pas seulement utiles, nous sommes essentiels. Alors, pour paraphraser le vieux Pompidou, cessez de nous emmerder. Et lisez attentivement la nouvelle formule de cette niouzeletteure, qui, à partir de début octobre, vous proposera de lire nos récits de vies engagées, sans omettre d’accueillir la parole et les attentes à notre endroit de ceux que nous aimons et qui, souvent, nous aiment : les jeunes.
Enfin, quittons maintenant les papotages pour aborder les vrais sujets qui fâchent : l’antisémitisme devenu une occupation quotidienne dans nombre de pays - dont le nôtre - et la pratique banalisée du gYnocide, loin de nous, en Afghanistan.
Un ‘incident’ chassant l’autre, et ce type ‘d’incidents’ étant quasi quotidien, on a presque oublié (mais ni vous, ni moi, bien sûr) celui qui s’est déroulé en Espagne en ce début d’été, au départ d’un vol Vueling.
Mercredi 23 juillet, une quarantaine d’adolescents juifs d'une colonie de vacances et leurs 7 accompagnateurs ont été violemment débarqués à Valence (Espagne) d’un vol Vueling à destination de Paris. La compagnie qui a prétexté des "comportements perturbateurs" avait sollicité l'intervention de la garde civile. En arrivant dans l'avion, les gendarmes ont procédé à l'expulsion des jeunes et menotté au sol l'une des responsables de la colonie parce qu’elle s’opposait à la confiscation des téléphones portables des enfants par les gendarmes (pour supprimer toute photo prise à l'intérieur de l'avion). Mais une vidéo filmée par une des accompagnatrices fait malgré tout le tour des réseaux. La polémique est lancée : Vueling est accusée de "discrimination sur le fondement de la religion" par les organisateurs de la colonie de vacances qui porte plainte. Et des témoignages d’autres passagers confirment que les enfants n’avaient rien fait de mal, à part entonner une chanson en hébreu. Notre très vigilant ministère des Affaires étrangères a demandé des comptes à Vueling qui lui a garanti la conduite d’une enquête rigoureuse. On verra ses conclusions lorsqu’elles seront dévoilées. Si j’évoque cette affaire, c’est pour suggérer une réaction collective : boycotter la compagnie Vueling. Il me semble en effet que le meilleur moyen de lutter contre les incivilités, les agressions, les intimidations, les humiliations, est d’attaquer leurs auteurs au porte-monnaie. Ce n’est pas toujours possible, s’ils sont inconnus, ou insolvables (en ce cas, reste à les punir). Mais lorsqu’on le peut, boycotter les méchants contribue à les faire réfléchir pour l’avenir. Bien sûr, si la fameuse enquête révèle une vérité donnant raison à la compagnie, je m’engage à présenter mes excuses et demander à mes lecteurs de renoncer à ce boycott.
Après cette contre pub, une pub …
J’ai plaisir à me faire l’écho de la décision de Franck Louvrier, maire de La Baule-Escoublac et de son conseil municipal, de planter un olivier au pied de l’hôtel de ville en hommage à Ilan Halimi, le mercredi 27 août dernier, en présence de Mario Stasi, président de la Licra (Ligue internationale contre le racisme et l’antisémitisme) et Jean-Pierre Curiel, président de la communauté juive locale. Ils répondaient ainsi à l’appel aux maires d’Alain Jakubowicz, président d’honneur de la Licra, après la destruction à Épinay-sur-Seine (Seine-Saint-Denis) de l’olivier planté en hommage à Ilan Halimi, enlevé en janvier 2006 puis séquestré, torturé et tué du fait de son appartenance à la communauté juive.
C’est l’occasion - après tout, c’est un numéro ‘Verbatim’ - de vous faire découvrir un poème ‘baulois’ de notre cher abonné Xavier de Paris qui aime cette ville comme si elle était la sienne.
Finalement je suis de bonne humeur ... Je viens de m'apercevoir que le ciel est bleu au dessus des voies ferrées de la gare de Lyon.
J'imagine que je marche au bord de la plage à La Baule, alors que je prends la direction de l'ascenseur pour la cantine. La Baule n’est pas un lieu, mais un instant,
Posé dans l’imaginaire d’une vie, il prend la durée que celle-ci a voulu lui donner.
Capter cet instant fugace lui donne alors son éternité.
Ile posée au milieu d’un monde dont elle ignore les problèmes,
La Baule échappe au temps pour cet instant, bref ou long dans une vie, que nous lui accordons.
L’Afghanistan, pays fracturé, pays du malheur, a subi, dans la nuit du 31 août au 1er septembre un séisme de magnitude 6, dans l’est, à une trentaine de kilomètres de Jalalabad, chef-lieu de la province de Nangarhar. Un premier décompte macabre fait état d’au moins 800 morts et près de 3000 blessés. Comment peut-on se relever lorsqu’on va de désastre en désastre ? Que pouvons-nous faire, nous, observateurs impuissants, sinon faire en sorte que cette population martyre ne soit pas oubliée en continuant à écrire sur elle ?
Nous vous invitons à lire ou relire le témoignage du colonel Stéphane KAYSER - attaché de défense de l’ambassade de France à Kaboul en août 2021, publié dans le n° 2767 du magazine Le Point du 7 août 2025. La première page de ce reportage - qui en compte quatre - est reprise ci contre. |
Françoise Hostalier, Présidente du Club France-Afghanistan, à l’occasion du sinistre 4ème anniversaire, le 15 août 2025, de la prise du pouvoir par les talibans en Afghanistan, nous invite à visionner et lire deux documents :
Le pays s’enfonce, jour après jour, de plus en plus dans la misère économique et sociale. La société afghane que nous avions connue, à travers toutes ses diversités, n’existe plus… Les talibans imposent la leur, totalement rétrograde, à travers la terreur. À Paris et dans plusieurs villes du monde, des manifestations sont organisées ce 15 août pour commémorer cette tragédie.
Dans le cadre du souvenir de ce funeste jour, je vous invite à vous procurer le n° 2767 du magazine Le Point du 7 août 2025 où vous pourrez lire le reportage et le témoignage du colonel Stéphane KAYSER - attaché de défense de l’ambassade de France à Kaboul à ce moment-là -. Apparemment, il garde un peu d’espoir, se fiant aux jeunes de la diaspora… puisse-t-il avoir raison…
Ne manquez pas non plus de visionner l’excellent reportage du JT de France 2 réalisé en juillet dernier sur l’hôpital la Mère et l’Enfant de Kaboul. Voici le lien sur le site de France info : https://www.franceinfo.fr/monde/afghanistan/kaboul-l-hopital-du-dernier-espoir_7351446.html
Pendant combien de temps cet hôpital pourra-t-il remplir sa mission ? Malgré ces nouvelles consternantes, il nous faut, avec le colonel Kayser, garder l’espoir.
Dernière minute : Françoise HOSTALIER nous relaie le message d’Éric CHEYSSON Président de La Chaîne de l’Espoir, seule organisation à ce stade en mesure d’agir efficacement :
Tél. 01 44 12 66 66 - donateurs@chainedelespoir.org
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Dominique de Vincennes a élargi l’intérêt pour l’Afghanistan que cette lettre vous propose de partager. Je l’en remercie vivement : ce faisant, il dévoile la note d’ambiance de la nouvelle formule de cette niuouzeletteure, sortie prévue début octobre.
Au delà sujet lui-même (l'Afghanistan) vous évoquez l'intérêt que peuvent porter les" gens d'un certain âge" à des événements réputés lointains. Je suis évidemment d'accord avec vous. Ayant eu la chance de connaître (et, pour certains, de vivre) des situations très différentes de celles du présent, je sais le "vieux regard" mieux à même d'essayer d'en tirer des enseignements. Il y a un risque et un biais: celui de trouver que "tout était mieux avant". Un article récent d'un neuro scientifique (dont j'ai malheureusement omis de noter les références) en donnait une explication plausible : notre mémoire longue efface les mauvais souvenirs et privilégie les "bons". Inversement, notre mémoire courte (de plus en plus vacillante d'ailleurs) reste marquée par les mauvais passages récents de notre existence (une altercation avec un cycliste écraseur, la vison d'un navet à la télé, le dernier discours de Trump, etc). Autrement dit, nous noircissons le présent ou le passé rapproché et idéalisons le passé lointain. ce bais est très communément partagé, le tout étant d'essayer d'en prendre conscience et de chausser les bonnes lunettes pour rectifier la vision des temps présent et passé (plus facile à dire qu'à faire, au demeurant) !
Ces chroniques ont également inspiré Dominique de Vincennes, décidément disert ces derniers temps :
Toujours très vivantes, ces Chroniques Maya, même lorsqu'on ne connaît pas le pays (ce qui est mon cas). Une remarque en passant. L'auteur évoque la réaction locale fort peu avenante à l'égard de la France. J'en retiens deux enseignements contradictoires. le premier est que notre pays a encore une certaine importance puisqu'on attache une certaine valeur (même négative) aux décisions françaises, le second est que notre passé colonial reste un boulet et que, décidément, nous avons mal géré cette aventure, les pays les plus colonialistes (l'Espagne et la Grande-Bretagne) sont rarement épinglés pour ce volet de leur passé pourtant tout aussi peu glorieux que le nôtre mais ils ont su s'en dégager plus vite et plus "élégamment". Si l'histoire (coloniale) était à refaire…
Et voici maintenant votre feuilleton (préféré ?) : Les Chroniques du monde Maya, de Jean-Pierre de Nice. Retour vers le Guatemala ! 2013 - 2025 … En 22 ans, rien de nouveau sous le soleil, n’est-ce pas ?
2013 toujours :
Quelle mouche a piqué la Cour Suprême de Justice du Guatemala ? Elle s’est mise en tête de moraliser la Justice du pays, de sanctionner les magistrats qui ne rempliraient pas certains critères d’objectivité et d’indépendance (ah bon ? … il y en aurait donc qui seraient influençables, et même, allez savoir, influencés ?), d’établir certaines règles de fonctionnement … Mais où allons-nous ? s’est écriée la présidente de l’Association des Juges : on veut porter atteinte à nos droits ! C’est intéressant de voir la liste des fautes que les juges ne devront plus commettre si la loi est votée : ne pas exercer d’autre activité ; ne pas faire pression sur les autres juges, et pour ceux qui seraient soumis à des pressions, y résister absolument ; ne pas interférer dans les critères de décision des juges de rang inférieur ; ne pas demander, provoquer ou accepter faveurs, cadeaux ou sommes d’argent ; être présent aux actes judiciaires et aux audiences publiques ; ne pas faire de propagande partisane ; etc …Y a du boulot !! Mais rassurez-vous : de l’aveu même de son président, ce projet de loi n’a aucune chance de passer au Congrès. Allez … la « Justice » au Guatemala a encore de beaux jours devant elle ! Et comme on pouvait s’y attendre, l’excellent général Efraïm RIOS MONTT a été autorisé par la Justice à regagner son domicile. Il a aussitôt quitté l’hôpital militaire où il était soigné pour mille et un maux. Son domicile fait l’objet d’une surveillance policière importante, officiellement parce qu’il est aux arrêts domiciliaires, en fait aussi et peut-être surtout pour éviter de fâcheuses démonstrations d’hostilité de la part d’une population plutôt remontée contre son ex-président. Les gens sont ingrats ! Le médecin-chef de l’hôpital en a profité pour allonger encore la liste, déjà impressionnante des malheurs qui l’accablent : hypertension, arythmie, insuffisance rénale, cataracte de l’œil droit.
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Il faut bien essayer d’oublier un peu ses soucis … alors, les gens, aussi pauvres soient-ils, essaient de faire un peu la fête. Certaines sont hautes en couleur (fête des morts, qui voit les cimetières se transformer en joyeux pique-nique familial, fêtes des cerfs-volants, qui mobilise les « fans » pendant presqu’un an de préparation pour le vol éphémère de ces merveilleux engins). D’autres sont plus modestes et ont lieu, en général, autour d’un saint protecteur du village. Les jeunes, comme partout, jouent au ballon avec n’importe quoi, parfois une cannette vide fait l’affaire. Et puis on s’agglutine devant une télévision commune, quand il y en a une, et quand il y a de l’électricité, pour vibrer à l’occasion d’un match de football au rythme des performances de son équipe préférée. Pas de cinéma dans ce pays (sauf dans la capitale). On commence à voir ici et là des « points-internet » et les gamins y jouent à des jeux électroniques qui les font rêver. Bien sûr, dans la capitale et à Antigua (l’ancienne capitale coloniale devenue une vraie ville-musée classée par l’UNESCO), la population est mieux lotie : outre les cinémas, des centres commerciaux hyper-modernes, avec des boutiques des grandes marques internationales, quelques théâtres, quelques galeries de peinture, quelques groupes « pop » qui essaient de faire parler d’eux, une élection par ci par là d’une « Miss Quelque chose », …. Mais 80% de la population du Guatemala n’a jamais mis les pieds dans la capitale, qui n’est pourtant jamais bien éloignée. J’ai rencontré des familles qui habitent à 50 kms de la mer … et ne l’ont jamais vue ! Tout cela ne les empêche pas de sourire aux étrangers qui passent. Les Indiens sont gentils par nature … c’est ainsi ! La possession d’un téléphone portable est devenue une quasi obligation, une preuve d’un certain statut social. Oui, mais voilà … ça coûte cher ! Alors, pour les 4 premiers mois de cette année 2013, on déplore près de 33.000 vols de portables. Les commissariats sont débordés par les plaintes déposées par les malheureuses victimes (plus de 20.000), plaintes qui, bien sûr, n’aboutissent jamais. Mais le malheur des uns fait le bonheur des autres : les marchands de portables se frottent les mains et les deux fournisseurs de cartes téléphoniques, « Claro » et « Tigo », ne se plaignent pas : un téléphone volé, c’est une nouvelle carte vendue.
Aujourd’hui 12 juin 2013, c’est la Journée Mondiale contre le Travail des Enfants. Heureusement, une journée, c’est vite passé. Quelques articles indignés dans la presse, trois ou quatre cris d’alarme lancés par des associations spécialisées, une ou deux déclarations officielles pour dire combien les autorités sont préoccupées par ce dramatique problème, et hop ... passons aux choses sérieuses. Dans la très grande majorité des familles indiennes, familles nombreuses, un enfant doit, à partir de l’âge de 5 ans, se débrouiller pour gagner sa pitance quotidienne. Ecole le matin ou l’après-midi, OK à la rigueur, mais le reste du temps, il faut trouver de l’argent. En général, les gamins et les gamines essaient de vendre des produits d’artisanat aux touristes, quand il y en a, ou vont travailler dans les champs, ou vendent quelques produits agricoles sur les marchés, ou proposent aux passants chewing-gums, kleenex ou autres bricoles. Dans les villages reculés, les enfants ne vont même pas à l’école : pas le temps (ni les moyens, d’ailleurs) ! Rappelons quelques chiffres : 3% de mortalité infantile, près de 40% de la population a moins de 15 ans, 30% de cette même population est analphabète (cela va jusqu’à plus de 70% chez les femmes). Ajoutez que près de 75% des terres appartiennent à 2% des familles, et que, par exemple, on compte moins d’un médecin pour 1.000 habitants … Pendant que chez nous on se demande ce qu’on va manger, ici, beaucoup, notamment des enfants, se demandent s’ils vont manger …Tout est dit !
À suivre …
Enfants indiens / Photo : S.Lainé 2011
VICENZO SALAFIA, le père de notre illustrateur préféré, Fulvio de Milan, a eu 100 ans le 15 août 2025 ! À cette occasion mémorable de l’atteinte de son 1er siècle, la mairie de Milan lui a offert une splendide médaille et une photo datée de 1925, son année de naissance, d’une célèbre place de la ville. Sauriez-vous l’identifier ? Allez, je vous aide : elle se trouve entre le Duomo et le Castello Sforza…BUON COMPLEANNO! AUGURI! |